Histoire des Arts

 
 

Flaine, une ville de loisirs

d'après Flaine, la modernité au service de l'or blanc
HORIZONS
N° 5186 du 18/04/2003 - page 426

Seule station de montagne des années 1960 " site classé ", FLAINE a une histoire hors normes : son architecte et maître d'œuvre, le maître du Bauhaus Marcel BREUER, a édifié le Palais de l'UNESCO à PARIS, le Whitney Museum à NEW-YORK…

Ce complexe de ski créé ex nihilo, en pleine montagne et ouvert en 1969, symbolise le concept de station « intégrée », située au pied des pistes.

«Quel beau site, comment ne pas le gâter ? ».

Tel fut, en 1959, le premier dessein de Marcel Breuer lors de son survol en hélicoptère de ce qui n'était encore qu'un grand champ de neige dans le massif alpin d'Arve Giffre. Découvert au cours d'une promenade en raquettes, le site de Flaine avait d'abord séduit René Martens et Gérard Chervas qui firent appel aux Boissonnas - et, par alliance, à la famille Schlumberger - pour financer leur projet de station. L'un des deux frères, Eric, un ingénieur, guide de haute montagne et voisin aux Etats-Unis de Philip Johnson et Marcel Breuer, fut immédiatement enthousiaste. De retour en France après quelques années passées outre-atlantique, il rêvait de villes nouvelles et d'importer en France la modernité américaine. Le site lui plut. D'autant que son éloignement des centre-villes historiques le libérait de toute contrainte architecturale. Pourtant, ses rapports avec Maurice Michaux, l'ingénieur de l'équipement qui régnait sur le plan « neige », n'auguraient pas d'un chantier serein : pour cet aménageur, Boissonnas était « un poète encombré de millions ».

« Un musée à ciel ouvert »

Il faut dire qu'il avait d'emblée exprimé ses ambitions : faire de Flaine une « aventure culturelle », un « musée à ciel ouvert ». S'il prit soin de s'entourer d'urbanistes et d'architectes français déjà familiers des grands travaux dans ces régions, comme Laurent Chapis et Denys Pradelle, ainsi que du « découvreur » du site, Gerard Chervas, il manifesta aussi sa volonté de rompre avec la pratique locale en faisant appel, à New York, au « dernier des modernes », Marcel Breuer, formé à l'école du Bauhaus.

L'exiguïté du terrain constructible réduit à quelques replats sur le flanc nord du massif obligeait à concentrer les bâtiments et à les bâtir en hauteur. Eric Boissonnas prit le parti d'une architecture homogène et moderne - loin des chalets savoyards - et d'une station interdite aux voitures.

Entre les bâtiments du haut et ceux du bas, deux ascenseurs téléphériques assurent la communication.

Comme d'autres dites de la « troisième génération », Flaine est une station de ski intégrée : au sous-sol des parkings, en rez-de-chaussée, des boutiques, des restaurants, des boîtes de nuit, tout pour l'après-ski ; au-dessus, des appartements.

La naissance des « pointes de diamant »

Compte tenu de l'altitude de Flaine, entre 1 600 et 1 800 m, la préfabrication s'imposait. Et Marcel Breuer découvrit à cette occasion le procédé de Jean Barets qui donnait jusqu'à 50 cm de relief aux panneaux. Ainsi naquirent les « pointes de diamant » ou les façades « d'ombre et de lumière » sur lesquelles les rayons du soleil venaient se briser.


Immeuble Bételgeuse,
Arâches,

L'immeuble «Bételgeuse», situé dans le prolongement de l'hôtel «Le Flaine» est l'un des premiers immeubles construits dans la station à partir de 1966, et illustre le parti-pris moderne de l'architecte par l'emploi du béton brut, notamment les panneaux en pointe de diamant sur lesquels la lumière vient jouer avec les ombres des balcons en forte saillie.

L'architecte avait trouvé là le moyen de rompre « l'horizontalité des lignes de niveaux auxquelles sont asservis les bâtiments, créations humaines, opposées aux reliefs chaotiques de la montagne ». Le béton, parfois imprimé de motif, est laissé brut pour rappeler l'environnement calcaire. Et la rigueur -ou faut-il dire austérité- de l'ensemble n'est adoucie que par de grandes oeuvres d'art moderne comme Le Boqueteau de Dubuffet en résine epoxy ou la Tête de femme de Picasso de 12 m de hauteur, réalisée en béton et nid d'abeille à partir d'une maquette exposée dans le musée de l'artiste à Paris. La station accueillit ses premiers skieurs en janvier 1969.


Dubuffet Le Boqueteau 1969-1988


Picasso,Tête de Femme, 1957-1991

La station a été le lieu d'innovations successives

• un centre libéré des voitures,
• une centrale de chauffe au gaz non polluante,
• une télévision câblée interne à la station,
• les premiers canons à neige
• des gares de téléphérique et de télécabine de plain-pied avec les pistes…
• et plus récemment un des tout premiers télésièges débrayables 8 places.

Le Centre Culturel de Flaine propose une documentation au format PDF, avec une liste non exhaustive des oeuvres visibles dans la station.



 

http://histoiredesarts.9online.fr (2003)

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